Avec Tania
Résidence en duo chez-soi, dans le cadre de Gestes pour la Terre ou les formes possibles d’être ensemble, volet Saguenay–Lac-Saint-Jean, 27 août au 5 septembre 2023
Cette corésidence avec Tania Solomonoff fait partie d’une série de trois résidences consécutives effectuées par l’artiste mexicaine au Québec (Cantons de l’Est, Saguenay et Montréal). Cette présente phase, caractérisée par le partage en duo des processus de création dans mon univers quotidien, est animée par la confiance, la curiosité et l’autonomie. Ceci se concrétise par une variété d’actions artistiques qui se déroulent d’abord au sein de mes espaces familiers que sont la maison-atelier, le jardin et la forêt environnante, pour rayonner en allers-retours ailleurs sur le territoire. Ces activités sont ponctuées de moments de dialogues, accompagnées d’un carnet et d’un microphone. L’ensemble de cette démarche privilégie la cohabitation, la rencontre, la cocréation et le partage de nos techniques, de nos lectures et de nos méthodologies, avec l’intention délibérée de contaminer nos pratiques par ces échanges à la fois enrichissants et déstabilisants.
Plus précisément, Tania m’invite à disperser ici 28 broderies confectionnées en 2021 au Mexique dans la phase initiale du projet Gestos para la tierra. Quant à moi, je propose d’entrelacer des fils à broder aux branches d’un arbre ravagé par la tordeuse de bourgeons d’épinette. Par ailleurs, mon atelier devient le lieu désigné d’une installation évolutive, alimentée quotidiennement par des séances de création conjointes ou séparées. Parallèlement, nous nous rendons à une ferme florale, un marché fermier, des centres de diffusion et de production artistique, une forêt, de même que sur les eaux du fjord du Saguenay, dans le but de nourrir nos processus par ces expériences variées et immersives avec le territoire. À la toute fin de son séjour, nous échangeons quelques réalisations individuelles et communes, en vue de les réactiver à l’intérieur de nos propres projets.
Photos : Nathalie Lavoie et Tania Solomonoff
« Quel serait le sens artistique d’une résidence dans sa propre maison ? Quels critères de soin, de coexistence, d’apprentissage sont mis en jeu ? Quels déplacements physiques, psycho-affectifs, symboliques, culturels s’y opèrent ? Comment les espaces et leurs différentes matérialités et fonctionnalités sont-ils articulés et activés pour faciliter les rencontres ? Nathalie Lavoie : la maison, le jardin, Moly, la forêt, le fjord, le parc national, la ferme florale et l’artiste – des humains et plus que des humains stimulés par des processus artistiques ? Dans ce contexte, comment nos réalités somatiques sont-elles affectées par les réalités de l’environnement ? Chaque geste compte-t-il ? Où commencent et où finissent les gestes, la maison et l’acte d’habiter ? Les catégories de la valeur d’une pièce artistique changent-elles lorsque la production a lieu dans cet espace ? Alors, produisons-nous de l’art ou produisons-nous de l’expérience, ou est-ce la même chose ? La coexistence est-elle une manière collaborative de nous créer et de nous recréer ? Comment ces processus peuvent-ils être diffusés ? Où, quand et comment ? Et plus précisément, la présence physique dans un espace physique spécifique (Saguenay, Québec, la maison de Nathalie) est-elle pertinente pour les objectifs processuels de Gestes pour la Terre ? Les broderies en tant que messagères et pièces relationnels sont-elles habilitées, transformées, mobilisant des états psycho-émotionnels, des connaissances ou des façons de vivre ensemble à la maison et à l’extérieur ?
L’exercice du domicile est un geste qui peut impliquer des relations intimes et personnelles avec le territoire – y compris les corps – comme des relations extensives et transpersonnelles. Ceci renvoie à la notion de circulation des espaces et à leur mémoire affective. Le centre appelé « la maison », à partir duquel les idées et les actions liées à un environnement semblent être gérées, n’est pas le seul centre. En ce sens, toutes les communautés sont conscientes de cet échange continu entre l’intérieur et l’extérieur de différentes manières, car une arrière-cour ou un terrain maya n’est pas la même chose que la cour d’un quartier de Mexico ou le jardin de la maison de Nathalie. Mais la question est de savoir ce qui se passe lorsque nous réalisons que les processus de vie et de création sont imbriqués dans les territoires quotidiens pour promouvoir des pratiques artistiques, somatiques et de soins spécifiques. J’aimerais penser que tout cela a quelque chose de résilient et que, dans cette perspective, les broderies de Gestes pour la Terre élargissent leur sens et leur raison d’être. » [Traduction libre]
Tania Solomonoff, Gestos para la tierra o las formas posibles de estar justos, Québec, 2023, publication numérique.
GESTOS PARA LA TIERRA O LAS FORMAS POSIBLES DE ESTAR JUNTOS
Gestes pour la Terre, ou les formes possibles d’être ensemble, rassemble des dérives, des dessins, des performances et des vidéos créés par Tania Solomonoff en collaboration avec un réseau d’artistes : Camille Renarhd (Studio D), Nathalie Lavoie (artiste visuelle), Amélie Choquette Lemay (RURART) ainsi que des femmes qui habitent la ferme La Généreuse en Estrie. Les divers matériaux s’inspirent de moments de convivialité et d’exploration du territoire avec les broderies, le tout dans un format qui transite entre la somatique, la documentation, l’entrevue, l’objet trouvé, des pièces créées et le graphisme libre.
Cocréation Mexique : Rosaura Peraza Miranda, Flori Chan Bacab et Tania Solomonoff.
Cocréation Québec : Camille Renarhd, Nathalie Lavoie et Tania Solomonoff.
Coproduction Québec : Camille Renarhd (Studio D), Nathalie Lavoie, Laboratoire agro-culturel RURART et Tania Solomonoff.
Collaborations à la ferme La Généreuse : Camille Lacelle-Wilsey, Alex-Ann Boucher, Chiara Fossati et Francine Lemay.
Ce projet a été rendu possible grâce à l’appui du Secretaría de Cultura y Sistema de Apoyos a la Creación y Proyectos Culturales de México.